Du Terrier au Perchoir
Où c’est un peu de fiction comme ça, sans savoir où je vais et sans attendre plus.
Camomille aimait les fleurs sèches mais pas fraîches, les biscuits décadents qu’elle n’avait pas enfant et se brosser les ongles matin et soir. Elle aimait des choses qui s’égrènent et font un être, des bizarreries pour les uns, des logiques pour les autres. Elle aimait des choses qui étaient elle sans qu’elle ne le sache, parce que de toute façon, elle ne se regardait pas tellement, Camomille. Se regarder, c’est vilain, dit sa mère. « La mère », Camomile pense à elle comme ça, à une mère qu’elle a parce qu’il faut bien. La mère avait plein de préceptes, sur se regarder qui est vilain, parler de soi aussi, mais bizarrement réfuter un potentiel compliment, tout aussi vilain. La mère, la mère était très dans le monde, avec ses adages qu’à elle et jusqu’à cette façon de marcher qui évoquait l’Allemagne avalant la Pologne. La mère l’avait baptisée de ce prénom qui allait mal à son ventre, son ventre en feu et vent. Camomille, pour la pelouse qu’elle aimait tant jeune étudiante, dans une université qui semble un rêve fait, comme une vie pas eue. A son anniversaire, la mère lui rappelait toujours, l’accouchement dans la souffrance et le sang, le nerf sciatique coincé et le père qui partait déjà, à fumer et rêver d’un avenir qui ne serait jamais le sien, son père qui toute sa vie n’a fait que ça, partir dans ses cigarettes et les chemins qu’il refaisait. Elle lui rappelait, le prénom soufflé dans la fatigue, la peur ensuite que le père n’en fasse qu’à sa tête, aille à la mairie déclarée une Jeanne, une Louise, pas du tout la Camomille qu’elle avait porté ces mois. Car malgré tout, malgré les fils distendus, les Noël à crier, les silences et les pertes, la mère, elle aimait ce jardin flamboyant qu’était sa fille. Et elle se souvenait, les promenades, le cinéma, les écritures consciencieuses au petit café en bas de la maison, avec son corps habité par l’enfant à naître et qu’elle connaissait déjà. C’est d’ailleurs ce qu’elle lui avait dit, en la tenant bien vive et bien là sur sa peau moite : « Enfin ». « Enfin », comme si les derniers mois, elles n’avaient fait que vivre dans une cabane planquée, à se chuchoter des secrets sous les draps et les déguisements.
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